Fête du Livre de Kinshasa : un événement à repenser pour l’avenir du livre en RDC

La Fête du Livre de Kinshasa, après onze éditions, reste un rendez-vous incontournable pour les auteurs, lecteurs et éditeurs congolais. Cet événement, soutenu principalement par des institutions étrangères comme l’Institut français de Kinshasa et a Délégation Wallonie-Bruxelles, a permis depuis 2013 de faire découvrir plus de 320 auteurs et d’exposer plus de 15 000 ouvrages. Pourtant, malgré cette longévité et cet impact culturel, le modèle actuel montre ses limites et appelle à un profond renouvellement.  

Ecouter cet article, lu par une voix d’IA (Observations sur la Fête du Livre de Kinshasa )

Le constat : une dépendance structurelle  

Depuis plus d’une décennie, les mêmes recommandations se répètent sans réformes structurelles. Le financement public congolais du secteur du livre demeure marginal. Selon les données du Ministère de la Culture (2023), moins de 1% du budget national de la culture est alloué au livre et à la lecture publique. La dépendance vis-à-vis des bailleurs étrangers (France, Belgique, Suède) reste donc quasi totale.  

La visibilité du gouvernement se limite souvent à des apparitions protocolaires lors de l’ouverture ou de la clôture. Une fois les projecteurs éteints, les auteurs, éditeurs et libraires locaux sont livrés à eux-mêmes, sans mécanismes d’accompagnement, ni subventions, ni soutien logistique. Cette situation fragilise la chaîne du livre et empêche la professionnalisation du secteur.  

Pour garantir la pérennité de la Fête du Livre, il est essentiel que les auteurs congolais s’approprient l’événement et en fassent une plateforme indépendante, tout en exigeant une réelle implication du ministère de tutelle, tant dans la préparation que dans le suivi des retombées économiques.  

Le défi : la crise du livre et des lecteurs  

La crise n’est pas seulement locale, elle est mondiale. Depuis l’an 2000, l’avènement d’Internet a transformé les habitudes de lecture. En RDC, la situation est aggravée par la fracture numérique et la faiblesse du pouvoir d’achat. Une enquête de l’UNESCO (2022) révèle que moins de 10% des ménages congolais achètent un livre au cours d’une année, et que près de 60% des écoles publiques ne disposent pas de bibliothèque fonctionnelle.  

Parallèlement, le lectorat se déplace vers le numérique : les Congolais passent en moyenne 3 à 4 heures par jour sur les réseaux sociaux, ce qui réduit considérablement le temps consacré à la lecture. L’arrivée de l’intelligence artificielle accentue ce phénomène en modifiant la manière dont les jeunes générations consomment les contenus écrits.  

Le besoin vital du renouveau : intégrer le numérique et l’IA 

L’intégration des outils numériques et des IA dans la création et la diffusion des œuvres devient un passage obligé. Des auteurs africains comme Mohamed Mbougar Sarr ou Léonora Miano utilisent déjà les plateformes numériques pour promouvoir leurs livres et interagir directement avec leurs lecteurs. Les écrivains congolais peuvent eux aussi tirer parti de cette transition pour renforcer leur visibilité, notamment via :  

– La publication d’e-books sur des plateformes comme Amazon Kindle, Librinova,  ou YouScribe Africa.  

– L’usage des IA génératives pour améliorer la traduction, la révision et la promotion de leurs textes.  

– La création de clubs de lecture virtuels et de podcasts littéraires pour fidéliser leur public.  

Ces outils représentent non pas une menace, mais une opportunité de démocratiser la lecture et de moderniser le rapport entre auteur et lecteur. 

Propositions : diversifier les sources de revenus  

Le livre seul ne suffit plus à faire vivre un auteur. Dans un pays où le salaire moyen est d’environ 200 dollars par mois, il est illusoire de compter uniquement sur la vente d’ouvrages pour subsister.  

Une diversification des revenus est cruciale :  

– Développer des résidences d’auteurs en partenariat avec les universités et les ONG.  

– Créer des ateliers payants d’écriture et de narration numérique. 

– Valoriser les droits dérivés (adaptations audiovisuelles, spectacles, contenus éducatifs).  

– Promouvoir une édition locale en langues congolaises (lingala, swahili, kikongo, tshiluba) pour élargir le lectorat national.  

En definitive, cet evenement pourrait eetre un tremplin pour une nouvelle dynamique  

La Fête du Livre de Kinshasa peut devenir un moteur durable pour la littérature congolaise si elle embrasse pleinement la transformation numérique, la collaboration intersectorielle et la souveraineté culturelle. L’avenir du livre en RDC dépend de la capacité collective à transformer les défis en opportunités et à replacer les créateurs locaux au cœur du système. 

Par Jason KIBISWA

pour le Studio Malaika Agency

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